Jane Dieulafoy
Géorgie, Arménie, Azerbaïdjan, Iran, Irak.
Période des voyages 1881-1883, date de parution 1887. Original français. La date de cet article est celle du retour en Europe du couple sans que cela soit très précis.
Edition Hachette, Paris. Environ 4x 160 pages, beaucoup de gravures. Écrit en français moderne (peu de virgules cependant). Titre de la première parution: “La Perse, la Chaldée, la Susiane”.
Format numérique récent en divers formats: Une Archéologue en Perse: partie 1, partie 2, partie 3 et partie 4.
Publié en quatre parties et regroupant un voyage en Iran dans les années 1880. Le récit est journalier et décrit en détail toute la route qui passe pour l’aller par le Caucase. Cette femme énergique accompagne son mari dans l’exploration architecturale de l’ancienne Perse et le suit dans toutes ces explorations. Elle décrit les sites visités comme on les décrirait de nos jours dans un guide de voyage. Cette partie forme en gros 2/5 du récit. Plus de la moitié occupe les détails du voyage avec les tracas quotidiens, les visites chez divers dignitaires religieux, royaux et administratifs. Elle trace l’image d’un Iran fier mais étouffé par la corruption et les règlements absurdes. Elle décrit des mollahs ignorants et incultes qui fanatisent la population contre les chrétiens (donc aussi les voyageurs) et ces descriptions ressemblent très fort au fanatisme décrit après la Révolution Islamique de 1979. On découvre dans le récit de 1887 aussi des actes barbares perpétrés contre des ennemis par le pouvoir des chahs, on y voit que l’État Islamique, actif en Irak et en Syrie dans les années 2010, n’avait en fait rien inventé, tout ceci existait bien avant.
Ces quatre livres sont écrits dans un style gai, parfois sarcastique. Jane Dieulafoy n’hésite pas à s’y critiquer soi-même ou son mari. Il semble que c’était vraiment une femme en avance sur son temps, il n’y a qu’à voir l’explication qu’elle donne en introduction pour justifier qu’elle accompagne son mari: “Ces premières difficultés vaincues, quelques amis bien intentionnés tentèrent de me détourner d’une expédition, au demeurant fort hasardeuse, et m’engagèrent vivement à rester au logis. On fit miroiter à mes yeux les plaisirs les plus attrayants. Un jour je rangerais dans des armoires des lessives embaumées, j’inventerais des marmelades et des coulis nouveaux ; le lendemain je dirigerais en souveraine la bataille contre les mouches, la chasse aux mites, le raccommodage des chaussettes. Deux fois par semaine j’irais me pavaner à la musique municipale. L’après-midi serait consacré aux sermons du prédicateur à la mode, aux offices de la cathédrale et à ces délicates conversations entre femmes où, après avoir égorgillé son prochain, on se délasse en causant toilettes, grossesses et nourrissages. Je sus résister à toutes ces tentations. À cette nouvelle on me traita d’originale, accusation bien grave en province; mes amis les meilleurs et les plus indulgents se contentèrent de douter du parfait équilibre de mon esprit. L’heure approchait. De pieuses mains suspendirent à notre cou des scapulaires, des médailles les mieux bénies, des prières contre la mort; je fermai les malles et nous partîmes.”
Le livre contient beaucoup de gravures de monuments, d’hommes et quelques cartes. Ces gravures sont basés sur des photos, Jane Dieulafoy maniait un grand appareil et développait les clichés elle-même durant ses voyages. Sa curiosité et son hardiesse l’amènent dans les chambres des femmes et elle nous présente des personnes dévoilées impossibles à voir sinon en public.
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