Nous mettons aujourd’hui le pied dans une ville fantôme en Alaska. Mais avant, nous avons des longues routes solitaires devant nous.
En route vers Prince Rupert
Nous venons de Hazelton et suivons la vallée du Skeena River pour rejoindre la mer. 130 kilomètres avant d’arriver à l’océan, nous nous trouvons déjà à l’altitude zéro. Ainsi les montagnes sont impressionnantes comme dans les fjords norvégiens. La forêt est composée de cèdres sauvages de très grande taille. Bien sûr, la déforestation est ici le fléau comme partout au Canada, mais ici au moins la forêt a des chances de repousser par ses propres forces.
La route est en permanente construction, les hommes et femmes employés aux constructions sont très aimables, sans doute parce très peu de personnes passent ici. Nous roulons longtemps avant de trouver quelque chose à manger. Ce sera dans une baraque de routiers à Cedarvale. La météo s’améliore, mais il continue à faire frais.
Une nuit à Prince Rupert
Nous arrivons dans une ville portuaire dévouée à la pêche et à l’export de bois. On sent encore un peu le flair de la conquête de l’ouest canadien. Nous logeons au Highliner Inn.
Le réveil le 22 juin 1996 à 7 heures du matin n’est pas du goût de tout le monde surtout qu’au départ un délai inutile nous fait perdre une heure: un des profs a perdu son porte-feuille. On cherche inutilement et il le trouvera le lendemain dans les plis de son pantalon trop bien rangé dans sa valise. Nous avons ainsi cependant assez de temps pour un petit déjeuner commun dans une des chambres de l’hôtel. Nous organisons tout nous-mêmes.
L’air est de nouveau très brumeux, l’Océan Pacifique se fait sentir. Il faut bien que les 5000 millimètres de précipitations par an se fassent sentir. Nous ne voyons donc pas grand chose de la route jusqu’à Terrace. Ici part le Nisga’a Highway vers le nord. Cette route est beaucoup plus étroite et pleine de virages. Elle longe plusieurs lacs, mais on ne les voit pas toujours à cause de la forêt très dense. À partir du Kitsumkalum Lake, la route n’est plus goudronnée et les vans sont pannés boue et de sable gris de haut en bas.
Nisga’a Memorial Lava Bed
À la hauteur du Lava Lake, nous rejoignons les coulées de lave du Nisga’a Memorial Lava Bed dans la vallée du Nass River. L’effusion s’est produite en 1760 sans éruption, sans nuages et sans cendres. Un village amérindien a été détruit. En 1938 et en 1978, des grandes crues ont élargi la surface de blocs de lave, beaucoup de matériel volcanique a été transporte en direction aval jusqu’à Aiyansh. La lave est toujours apparente, des arbres chétifs trouvent cependant des humus entre les failles des blocs de basale. Les mousses et les lichens sont prédominants.
Fête dans l’école de Nisga’a à New Aiyansh
Nous devons rencontrer des représentants amérindiens de la tribu des Nisga’a. Mais personne ne nous accueille au village de New Aiyansh. Tous les gens semblent occupés à des affaires bien plus importantes, la plupart sont pompeusement habillés. Finalement, on nous indique d’entrer dans la cour de l’école où à lieu la remise des diplômes de fin d’année. La cérémonie est très symbolique, les écoliers passent sur un modèle de pont dans une autre période de leur vie. Les allocutions sont tenues en anglais et dans la langue locale. Ces discours tournent tous autour de l’identité amérindienne qu’il s’agit de défendre avec le savoir acquis. Les listes des noms montrent cependant que très peu portent encore des prénoms indiens.
La cérémonie officielle passe progressivement en mode fête avec beaucoup de fruits et de toasts au saumon. Les gens sont cependant et logiquement beaucoup occupés avec eux-mêmes, nous les laissons donc pour nous remettre en route. Celle-ci reste sous la forme d’une piste en mauvais état. Nous voyons des barrages de castors, des familles entières d’ours noirs et des torrents sauvages.
Cassiar Highway
À la Cranberry Junction, nous retrouvons une route en meilleur état, le Cassiar Highway. Il s’agit d’un croisement au milieu de nulle part, sur notre carte 1:1500000 y est placé un symbole indiquant une agglomération de 2500 habitants. Pourtant, on n’y trouve rien d’autre qu’un panneau stop.
La route continue de passer dans des grandes étendues forestières. Nous passons un village de bûcherons après 40 kilomètres, mais il est déserté. 40 autres kilomètres plus loin suit la Meziadin Junction. Il y a là quelques maisons, une station d’essence et un café avec des photos décoratives assez macabres: elles montrent des accidents de voiture et des rencontres avec des ours. Un ours empaillé se trouve dans un coin du local. Le vrai danger est tout petit: des millions de moustiques agacent tout le monde.
La météo s’arrange, le ciel bleu et le soleil est de retour.
Bear Glacier
Nous prenons à gauche à la Meziadin Junction. La route est de nouveau plus étroite. Elle nous mène vers Stewart et Hyder.
Une autre langue glacière descend des Cambria Icefields pour aboutir dans un lac.
Le glacier vêle des glaçons de différentes tailles. Certains, puis tous lancent des pierres pour les atteindre, mais rares sont ceux qui touchent le but.
Un peu plus loin se trouve un canyon par lequel chutent des masses de neige et de glace pour reformer un cône massif en bordure de la rivière. Nous sommes ici à une altitude de seulement 50 mètres.
Stewart
Ce port de pêche se trouve dans un fjord qui continue encore plus de 200 kilomètres avant de rejoindre la mer plus loin au sud-ouest. Les versants très raides des montagnes restent impressionnants.
La ville n’a rien d’intéressant, nous mangeons un casse-croûte dans les chambres du King Edward Hotel. Le soir, nous partons pour l’Alaska!
Ville-fantôme de Hyder
On change d’état pour arriver aux États-Unis et même dans un nouveau fuseau horaire. Le village n’est accessible par voie terrestre que du Canada, il n’y a donc pas de contrôles à la frontière. On trouve cependant une poste américaine, des magasins de souvenirs, deux pubs et quelques maisons en ruine.
Nous admirons le coucher du soleil dans le petit port. Il fait assez chaud, même si on voit les glaciers tout près en haut des versants montagneux.
Logiquement, nous finissons la soiré dans un des deux pubs avec billard, juke-box et du whisky. Certaines retournent avec un des deux vans, mais un petit groupe autour d’André préfère retourner à pied à travers la région la plus densément peuplée d’ours. Nous n’en voyons cependant pas.
La frontière est marqué par un panneau et surtout par le changement de revêtement routier: il n’y a de l’asphalte que du côté canadien.
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