Nous sommes tristes de partir du beau Toroweep Overlook au nord du Grand Canyon le matin du 18 juillet 1996, mais comme les jours précédents, nous nous souvenons du programme que nous nous sommes fixé. C’est bien le grand défaut des voyages outre-mer, on est forcément limité dans le temps même si on a quatre semaines pour l’ouest des États-Unis comme nous.
Le Shivwits Plateau
Nous prévoyons de prendre la voie la plus rapide vers l’ouest, du moins celle que permet notre petite voiture. Nous prenons une autre route qu’à l’aller et celle-ci atteindra même 150 kilomètres sans bitume. Le premier morceau, les 700 mètres du Toroweep Overlook jusqu’à la piste plus potable sont le premier défi du jour et le plus sérieux. À la monté, il faut tâcher de garder toujours toutes les roues au sol, sinon c’est l’échec garanti. Nous sommes donc plus attentifs qu’à la descente il y a deux jours. Nous repassons près du camping supérieur où nous ne voyons personne tout comme à la station des rangers. Dix kilomètres plus loin bifurque notre piste vers l’ouest pour passer au sud du Mount Trumbull. Bien sûr, aucun panneau indique ce croisement, mais notre carte est vraiment une merveille pour s’orienter.
Le Mount Trumbull et le Shivwits Plateau forment des barrières montagneuses et la piste est bien sûr en conséquence. Elle reste certes partout large et sèche, mais certains pierres sont trop hautes pour notre voiture et il faut faire attention à la garde au sol. Mais cela ne nous effraye plus, nous avons désormais confiance en cette voiture basique de série et nous maîtrisons parfaitement la boîte automatique tout en regrettant souvent le manque d’un embrayage classique.
André prend une partie d’un autre cactus lors d’un court arrêt au sud du Mount Trumbull. Mais celui-ci ne tient que quelques heures. La partie verte noircit et sèche à vue d’œil. Nous pensons d’abord à une astuce de survie, mais toutes les tentatives de le ramener à la vie échouent. Au point culminant de la route se trouve une forêt assez dense, verte et saine.
Après le Mount Trumbull, la route redevient bien meilleure et nous pouvons foncer. Nous passons ensuite dans le Main-Street-Valley, c’est un nom assez sarcastique pour cette partie perdue du monde. La route devient de plus en plus roulante, le gravier est régulier et nous passons aussi près de quelques maisons en bois. Nous croisons les premières voitures depuis 48 heures quand nous descendons des Black Rock Mountains. Cette route offre une bonne vue sur le Virgin River Valley. L’asphalte reprend peu avant St. George, nous voilà sur des routes plus sûres après 90 miles de piste. Ici, il y a même des feux tricolores, nous n’y sommes plus habitués. Nous faisons le plein d’essence car on consomme pas mal sur les pistes. L’Interstate 15 nous permet d’avancer rapidement vers l’est.
Les Virgin Mountains
Nous passons sans nous y attendre dans les Virgin Mountains. L’autoroute est posée dans les gorges du Virgin River, elle couvre en partie complètement le lit de la rivière. En avançant vers l’ouest, les versants se resserrent et les gorges deviennent plus profondes, mais l’autoroute continue toujours avec la même largeur en suivant le cours naturel. Ce spectacle se termine vite et on débouche sur une triste plaine désertique avec quelques arbre de Josué.
En passant ces gorges, nous quittons pour le première fois les hauts plateaux du nord des États-Unis, nous sommes maintenant descendus à 600 mètres d’altitude. Même la végétation du désert a l’air desséchée ici. Nous passons aussi dans l’état du Nevada et comme tous les jeux sont autorisés ici, on trouve tout de suite un casino à Mesquite. Les panneaux publicitaires au bord de l’autoroute sont plus grands et plus colorés qu’ailleurs. En arrivant au Nevada, nous passons aussi à la Pacific Time Zone. Le jour a donc pour nous une heure de plus, mais cela ne change rien pour Las Vegas, la ville qui ne dort jamais. Pour nous, qui vivons avec la lumière du soleil, ce changement d’heure est sans conséquence jusqu’à San Francisco.
Le Lake Mead
L’autoroute nous amène bien trop vite à la ville, nous descendons donc vers le Lake Mead. C’est une autre retenue sur le Colorado River. Son seul but est d’alimenter Las Vegas en eau et en électricité. Le lac n’est plus qu’à 570 mètres d’altitude. Nous savons qu’il fait chaud dehors et nous ouvrons les fenêtres et arrêtons la climatisation pour nous acclimater avant d’arriver. Mais lorsque nous descendons de la voiture à Overton Beach, nous tombons presque dans les pommes. Il fait 42°C, c’est donc au-dessus de la température du corps et un vent fort renforce cette chaleur sur la peau. C’est comme se poser devant un sèche-cheveux géant durant une journée d’été en Europe. Nous avons tenté de garer la voiture à l’ombre sous un peuplier parce qu’il faudra bien remonter dedans plus tard.
L’eau bleu nous attire bien plus que le désert autour. On planté ici quelques palmiers, mais il n’y a quasiment pas de végétation naturelle. Nous avons tellement chaud, que l’eau du lac nous procure une première impression de chaleur. Mais cette impression passe vite et rien qu’en nageant un peu, on sent que l’on transpire sous l’eau. Elle doit avoir plus de 30°C. L’effet de rafraîchissement est donc limité.
Par la suite, nous avons l’impression de devoir laver nos cheveux puisque nous allons en ville plus tard où nous devons louer une chambre d’hôtel. C’est idiot, dans l’hôtel la douche sera incluse dans le prix et climatisée, ici il faut payer exprès. Mais bon, on est jeunes et naïfs. Les douches se trouvent dans un immeuble qui ressemble à une école de voile. En sortant, les cheveux sont secs rien que sur les 50 mètres entre l’immeuble et la voiture. Christian, très à cheval à juguler les boucles dans ses cheveux, n’est pas content de l’action. Nous devons d’ailleurs constater que nous sommes tous les deux bons pour le coiffeur.
Valley of Fire State Park
Il est encore beaucoup trop tôt pour Las Vegas, en plein après-midi la ville est morte et beaucoup trop chaude. Nous allons donc voir le Valley of Fire State Park, il est tout proche au nord du Lake Mead. L’accueil a déjà fermé, mais nous payons quand même sagement les deux dollars par personne en jetant les pièces dans la boîte à lettre et plaçons le permis que l’on peut retirer soi-même derrière notre pare-brise. Nous nous demandons une nouvelle fois comment on nous contrôle réellement, mais nous ne voulons pas tenter de le diable ici dans la Vallée du Feu. Nous ne savons cependant pas ce qui nous attend ici.
Le paysage est uniquement minéral et désertique. Les rochers ont les couleurs habituelles passant du blanc au rouge, mais leurs formes sont spéciales ici. Le vent fait un sablage naturel et cela donne des formes douces aux rochers tout en faisant ressortir des parties plus dures. Le soleil est plus bas et ne chauffe plus autant, nous sommes de nouveau bien réveillés et nous explorons toutes les routes possibles jusqu’au White Dome. La route traverse plusieurs « dips », donc des rigoles d’eau, apparemment, il y a de l’eau quand il pleut.
Entre les rochers, ici en plein désert, nous trouvons une autre curiosité: une pompe à eau avec une eau fraîche et sans chlore, donc de très bon goût. Nous remplissons tous nos bidons et bouteilles et nous aurons ainsi de bonnes réserves pour les jours suivants.
Une route rectiligne nous mène en ligne droite du parc vers l’Interstate 15 et celui nous fait entrer à Las Vegas.
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